Je m'appelle Cécile et je suis coach en qualité de vie au travail
Vous êtes dirigeant d’une entreprise ou membre du CA d’une ONG ? Vous voulez développer votre entité ? La qualité de vie au travail est votre meilleur atout. Dans cette interview, vous allez découvrir comment la pétillante Cécile Schauer, coach en qualité de vie au travail, peut vous accompagner à booster le recrutement et la fidélisation.
Peux-tu nous parler de ton parcours et comment tu es arrivée à devenir coach en qualité de vie au travail ?
J’ai eu la chance d’avoir un parcours professionnel très enrichissant.
Si je reprends mon cursus académique, j’étais intéressée par tous les domaines : la littérature, les mathématiques, la philosophie. À l’époque, j’ai décidé de faire sciences éco à l’université, pensant que ce parcours m’offrirait un éventail d’opportunités. Malheureusement, je me suis ennuyée à mourir dans ces études. Je n’avais pas l’impression d’avancer, c’était un environnement très sectaire. Finalement, les seuls cours qui m’intéressaient, c’étaient les statistiques et l’économie du développement.
La dernière année de mes études, je me suis orientée vers les transports et la logistique internationale. J’étais fascinée par les gros bateaux, les conteneurs, les avions. Je voulais avoir un métier peu routinier, orienté solutions avec des problèmes concrets à résoudre. J’ai de ce fait commencé ma carrière dans ce domaine-là à Paris. Je suis venue au Luxembourg et suis devenue manager.
Quand j’ai décidé de faire une pause pour élever mes enfants, j’ai découvert le rôle intenable de femme au foyer. Tu penses H/24 à ta famille et à la logistique de la maison. Tu finis par t’oublier.
Ensuite, j’ai trouvé du travail dans une ONG, au Luxembourg. J’étais très heureuse de pouvoir commencer ce poste. Enfin, travailler pour des valeurs ! Malheureusement, cette expérience s’est terminée en burn out…
À ce moment-là, j’ai eu une prise de conscience : je n’étais pas un cas isolé. Je me suis rendu compte que dans les ONG (comme dans les startups), il y avait beaucoup de souffrance au travail chez les salariés.
J’ai passé beaucoup de temps à étudier ce qui générait tant de mal-être dans la gestion des ressources humaines. J’ai suivi des formations spécialisées en coaching, en coaching d’équipes, en développement personnel et organisationnel… J’ai bâti mon projet professionnel pour changer le monde du travail : en proposant de la formation et du coaching en entreprise.
Comment définis-tu ta méthode de coaching ?
Pour les entreprises comme pour les ONG, je m’adresse en priorité aux dirigeants. Eux seuls peuvent changer l’organisation ou les relations. Cet accompagnement personnalisé est à la base du cadre de coaching.
Je débute toujours mes accompagnements par des séances de coaching individuel, des échanges personnalisés qui me permettent de savoir qui sont mes interlocuteurs, quelles sont leurs motivations et leurs freins.
Pour les ONG j’organise ensuite des ateliers à la journée ou à la demi-journée en présentiel. J’utilise beaucoup d’exercices avec du mouvement. Je fais lever les gens et on favorise ensemble l’intelligence collective. Une mise en scène, à travers des actions concrètes, aide à la prise de conscience.
Ces séances de coaching collectif permettent au groupe d’identifier ses valeurs et surtout de voir comment les aligner sur ses pratiques en interne.
Pour les entrepreneurs et dirigeants, j’organise du coaching particulier à distance ou dans mon bureau. L’avantage, c’est qu’il est situé à côté d’une forêt. La marche, c’est le meilleur moyen d’aller de l’avant ! Le mouvement permet au coaché d’intégrer parfaitement ce qui est la bonne direction à prendre.
Pendant mes séances de coaching, j’aime faire réagir mes clients avec des questions qui les bousculent. Avoir des valeurs fortes c’est très bien, mais pour qu’elles puissent s’exprimer pleinement, les dirigeants doivent se poser la question du pouvoir et de leur façon de l’exercer. On revient ensemble à l’essentiel. Le but étant de prendre conscience que le cadre de travail et l’approche managériale sont un moyen d’exprimer leur personnalité et leur style. C’est la clé d’un bon leadership.
Et toi, quelles sont tes valeurs ?
Je n’aime pas me prendre au sérieux et je me sers de l’humour pour pointer ce qui ne va pas.
L’intégrité par rapport à moi-même. Je considère qu’être entière et honnête envers mes clients est la meilleure façon de leur apporter au maximum. Et souvent ça décoiffe !
J’aime agir en autonomie et avoir la liberté de conjuguer mon intuition et mon sens de l’analyse.
Y a-t-il des études ou des formations pour devenir coach et expert en qualité de vie au travail ?
(Rire) Oui, il y a plein d’études à faire ! La base, c’est une bonne connaissance de soi.
Et puis il y a deux axes.
Le premier, c’est d’étudier les organisations et tout ce qui est rattaché à un système, par exemple les études de la systémique. Il y a des écoles de coaching spécialisées dans ce domaine comme l’école de Palo Alto. Pour moi l’individu pris isolément n’a pas de sens. En revanche, un individu dans un système, là, c’est intéressant. Car suivant les systèmes dans lesquels il évolue, il ne se comporte pas de la même façon.
Puis, il y a bien évidemment l’étude de l’humain, indispensable si tu souhaites aider les personnes à aller vers une meilleure qualité de vie au travail.
C’est pourquoi, pour devenir spécialiste de l’épanouissement au travail, j’ai étudié dans beaucoup de domaines ayant trait à l’humain et aux organisations. La Gestalt, les neurosciences, la PNL, l’ennéagramme, la process com, l’analyse transactionnelle… autant d’outils de coaching qui enrichissent ma pratique.
Après, être coach professionnel c’est se former toute sa vie – ça tombe bien j’adore ça !
Peux-tu nous dévoiler tes conseils pour bien coacher ?
Mon conseil pour bien coacher, c’est être soi-même, développer son style unique ! Donc, en ce qui me concerne, c’est travailler sérieusement sans se prendre au sérieux ! J’aime la position d’accompagnement, j’aime être sans filtre. Je suis spontanée et j’aime rendre clair ce qui paraît nébuleux ou embrouillé.
Après quelques mois de coaching, mes clients me disent souvent qu’ils trouvent que leur situation est beaucoup plus claire. Cet accompagnement au changement leur permet d’avoir une meilleure connaissance d’eux-mêmes, de prendre du recul et donc d’atteindre leurs objectifs.
Et les résultats sont au rendez-vous : la qualité de vie au travail, c’est pour tout le monde. Salariés, managers et dirigeants. Et c’est la clé pour faciliter les recrutements et diminuer le turn-over.
J’aime être autonome et avoir la liberté de conjuguer mon sens analytique et mon intuition, au service de mes clients.
Qu’as-tu appris de ton expérience professionnelle, en matière de bonheur au travail ?
Ce qui rend possible le bonheur au travail, c’est une organisation structurée, bien adaptée aux différents contextes, ainsi qu’un système relationnel clair. Il est important qu’une entreprise ou une ONG se repose sur des structures. Si elle se repose uniquement sur des personnes, elle est à risque sur tous les plans.
Industrie, services, secteur non lucratif… Mon expérience dans différentes organisations me permet de comprendre très vite les dysfonctionnements d’un système. Avec un bon accompagnement, et un environnement de travail structuré, il est tout à fait possible d’améliorer sa qualité de vie au travail.
Amour et travail, voilà une association inhabituelle, pour ne pas dire paradoxale ! Qu’est-ce qui, dans ton histoire personnelle, t’a amenée à devenir une spécialiste en qualité de vie au travail ?
Au cours de mes expériences professionnelles, j’ai traversé des périodes pendant lesquelles c’était un plaisir de travailler. Je me suis dit que je ne pouvais pas être un cas isolé. Ma vision du monde, c’est de voir les gens heureux de se lever le matin pour aller travailler, créer, apprendre, résoudre des problèmes complexes.
Aimer travailler, le bien-être au travail, c’est possible et comme je sais que c’est possible, je veux que ça devienne souhaitable et que ça devienne une norme. Et j’insiste, cela concerne tout le monde. Dirigeants et managers compris. Parce qu’avec de bonnes compétences managériales et le savoir-être qui va avec, manager est un réel plaisir.
C’est quoi pour toi, la qualité de vie au travail ?
Ma définition, c’est d’avoir les conditions de donner le meilleur de soi-même d’une part. Tout en préservant sa santé et sa sécurité d’autre part. Les gens qui partent en burn out, ce sont des gens qui donnent le meilleur d’eux-mêmes, mais au péril de leur santé. Et de ce fait, ils tombent malades.
Pour moi, ce n’est pas ça la qualité de vie au travail. Si tu arrives à donner le meilleur de toi-même tout en te sentant parfaitement en sécurité et en ayant une bonne santé mentale et physique, tu auras une super qualité de vie au travail. Pour arriver à cela, il est important que les entreprises travaillent à améliorer les conditions de vie de leurs collaborateurs. Elles se doivent de prévenir les risques et promouvoir la qualité de vie. C’est la clé pour motiver tout le monde.
Quelles sont les ressources que les entreprises possèdent le plus souvent et pourtant négligent quand on parle d’amélioration des conditions de travail ?
La capacité d’écouter les autres et le fait d’exprimer ses besoins. Cela fonctionne bien évidemment dans les deux sens, autant pour les salariés que pour les dirigeants. Il y a une phrase que j’ai un jour entendue et qui a du sens : “pour être entendu, il faut savoir écouter”. Ce que je vois comme le plus gros frein à la qualité de vie de travail, c’est l’interprétation. Il y a souvent des malentendus…
Quel est ton point de vue sur le rôle des managers dans le bonheur au travail ?
Ils sont essentiels. Pour moi, le rôle des managers est de faire le lien entre la vision de l’entreprise, ses valeurs et l’opérationnel. Ils sont les garants du cadre ! Ils sont en contact avec la direction et avec le personnel. Ils ont la grande responsabilité de faire le lien entre les deux. De fait, ils sont les meilleurs facteurs de cohésion. Pour un management de qualité, il est très important qu’ils soient impliqués ; la qualité de travail s’adresse à eux, plus que jamais.
Quelles sont selon toi les erreurs les plus fréquentes que font les entreprises quand elles entreprennent de développer la qualité de vie au travail ?
Je dirais que l’erreur, c’est de s’attacher à l’individu avant de s’attacher à l’organisation dans sa globalité. Ce raisonnement est terrible pour l’humain quand il s’agit de burn out.
Pour te donner un exemple : quand un responsable part en burn out, on entend très souvent : “c’est parce qu’il ne tenait pas le stress” ou “il avait des problèmes personnels”. Malheureusement, avec ce genre de discours, on ne laisse aucune place à la remise en question. C’est plus facile d’accuser l’individu plutôt que l’écosystème dans sa globalité. C’est pour ça que dans ma méthodologie, je vais coacher les dirigeants, car ce sont ces gens-là qui ont le pouvoir de changer les choses. C’est à eux de créer un dialogue social et d’avoir la capacité d’allier le bien-être et l’efficacité au travail.
La deuxième erreur, c’est d’assimiler la qualité de vie au travail avec toutes les mesures que je qualifie de cosmétiques : séances de yoga, gestion du stress, baby-foot, corbeilles de fruits et compagnie. D’ailleurs, qu’est-ce que ça donne ? En général pas grand-chose si ce n’est du travail au service de com. Alors que changer la façon de travailler en profondeur amène des résultats bien plus tangibles. Et rapides de surcroît.
Que penses-tu du rôle d’une direction des ressources humaines ?
Le rôle des ressources humaines, c’est tout ce qui concerne la structure. Les DRH modélisent les fiches de postes, clarifient les pouvoirs décisionnels. Les ressources humaines jouent un rôle très important dans la prévention des burn out ou des situations toxiques ; elles doivent être capables de capter les signaux faibles. Elles sont là pour prévenir les risques professionnels, analyser le ressenti des salariés et évaluer le niveau de stress au travail.
Y a-t-il une tendance qu’il faut absolument suivre dans l’évolution des conditions de travail, selon toi ?
J’ai pu constater que les rapports de force sont en train de s’inverser. Aujourd’hui, il y a des secteurs qui sont en danger, car ils n’arrivent ni à recruter ni à fidéliser. J’ai l’impression que cette tendance est en train de se généraliser.
La bonne attitude face à cette problématique est de se poser la question de la structure. Pas de déplacer le problème avec des constats à la noix du style « les jeunes ne veulent plus travailler ». Mais bien sûr que si. Simplement les jeunes, comme les moins jeunes, ne veulent plus travailler dans une organisation délétère, qui n’a aucun sens et où ils comprennent bien qu’ils vont y laisser leur peau.
Comment les gens travaillent chez moi ? Quel employeur je suis ? Mon entreprise est-elle en adéquation entre ses valeurs et ses pratiques ? Voilà les bonnes questions à se poser. Et cela vaut tout autant pour le secteur non-lucratif en manque de bénévoles.
Ce processus de questionnement est essentiel pour donner envie aux gens de travailler dans votre entreprise et d’y rester pour évoluer. L’évolution professionnelle prend alors tout son sens.
Que penses-tu des débats actuels sur l’équilibre vie professionnelle – vie personnelle ?
C’est un sujet qui a tendance à m’agacer. Alors quoi, il s’agit de mettre un masque professionnel toute la journée et d’être soi-même en dehors du travail ? Ce qui me gêne encore plus, c’est l’idée de mettre ses batteries à plat au travail et de les recharger dans la vie privée.
Il y a, par exemple, des femmes qui choisissent un temps partiel pour retrouver un équilibre vie personnelle et vie professionnelle. Malheureusement, elles sont plus à risque de développer un burn out. Elles font en effet la même quantité de travail en moins de temps. Leur niveau de stress augmente, elles sont moins payées et moins considérées. Finalement, le temps à la maison, ce n’est pas du temps pour elles.
Bon allez, on ne va pas se mentir, qu’est-ce qui te fait te lever le matin ?
(Rire) La curiosité ! Quelle sera ma nouvelle découverte aujourd’hui ? Qu’est-ce que je vais apprendre ? À quoi vais-je réagir ? Ça commence avec mes enfants, à travers nos échanges – ou nos silences quand je prends le petit-déjeuner avec eux.
Puis en second, je dirais les occasions de rigolade. Beaucoup de personnes dans mon entourage ont des postes avec beaucoup de responsabilités. Ils ont fréquemment des inquiétudes liées à leur travail. Si j’arrive à les faire marrer au moment où ils s’y attendent le moins, et bien ma journée est gagnée !
J’aime apprendre !
J’aime la musique. Pour la petite histoire, j’ai fait le conservatoire. J’ai joué du piano pendant longtemps avec plaisir. Mais… depuis toute petite, je rêvais de faire de la clarinette. Quand j’ai vu que ma commune proposait des cours, j’ai sauté sur l’occasion !
Et à l’âge de 46 ans, j’ai commencé à réaliser mon rêve. La même année, j’ai été invitée à jouer au concert d’été avec la fanfare de mon village. C’était fabuleux.
Maintenant, je fais partie de « Fanfare Stroossen ». Et j’ai une chouette casquette ! Quand je me retrouve avec tous ces musiciens à jouer de la musique, ça m’apporte une joie immense.
Il y a quelques années, un peu par hasard, j’ai intégré un cours de clown. Ça a été une découverte incroyable.
Le clown n’a pas d’ego, il est dans l’accueil inconditionnel de la personne qui est en face. Et le clown ne calcule rien : il est dans le OUI. Qu’importe la situation ou la personne qui amène une proposition. Il prend. Et c’est cela qui touche : c’est l’absence de calcul.
À mon sens, c’est ce qui me prédestinait au coaching.
Le clown nourrit énormément ma posture de coach. Quel meilleur outil pour travailler à l’amélioration des relations sociales ? Désormais, je fais de l’improvisation théâtrale avec une troupe, les KOI. Cet art est une façon de continuer à évoluer dans mon métier et dans mon style de coach. Et surtout, je m’y amuse énormément ;o)
J’ai commencé l’aïkido sur le tard. Ce que j’aime dans cette discipline, c’est que l’on n’a jamais fini d’apprendre. Une fois qu’un geste est bien acquis, le Senseï vous propose d’aller plus loin.
Dans un groupe d’aïkido, ce sont les plus gradés qui s’occupent des débutants. Donc on a la chance de pratiquer avec des personnes de tous niveaux.
C’est un art martial qui demande de l’humilité et où la transmission est très importante.
Dans une entreprise, c’est la même chose : nous progressons en apprenant, puis en transmettant nos connaissances.
En tant que femme, en tant que personne, qu'est-ce qui te touche ?
La beauté ! Tout simplement quand je me promène et que je vois un bourdon qui butine un coquelicot. Je suis dans la contemplation pure. La beauté ça peut être aussi quand j’entends un air d’opéra avec une voix qui m’étonne particulièrement, ou du bon gros son d’Iron Maiden… c’est l’extase.
Ce qui me touche également, c’est la façon dont le rire rapproche les gens et permet de dédramatiser toutes les situations. J’ai vécu des situations très complexes et tendues. Dès que l’humour s’installe au milieu, très rapidement, des solutions arrivent, des liens se nouent. C’est important de dédramatiser. Les gens qui sont capables de rigoler avec les sujets hyper sérieux, je trouve ça très intelligent. Et c’est aussi ça la clé du bonheur au travail !