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Le burnout ou syndrome d’épuisement professionnel : une question de responsabilités

« Choisissez un travail que vous aimez et vous n’aurez pas à travailler un seul jour de votre vie. » aurait dit Confucius. Et maintenant, visualisez la pauvre Emily Blunt, assistante d’une directrice tyrannique dans Le diable s’habille en Prada : elle est malade, en plein surmenage. Il est très tard et elle répète, scotchée à son écran «  I love my job, I love my job… ». Elle présente tous les symptômes qui conduisent au burnout : surcharge de travail, fatigue, stress… Oh oui, elle l’aime son travail ! Il est juste en train de la tuer à petit feu. Ben alors Confucius ? On fait moins le malin maintenant ?

J’ai orienté une partie de mon activité sur la question du stress chronique en entreprise et la prévention des risques psycho-sociaux. Lorsque j’accompagne des personnes victimes de burnout à reprendre pied, leur mal-être se double d’une grande culpabilité. Florilège : « Si j’avais été plus fort, je n’aurais pas fait de burnout » « Je n’ai pas su gérer mon stress, j’aurais dû faire mieux. » « Jamais je n’aurais dû m’arrêter »… comme si elles avaient fait un burnout toutes seules. Il est grand temps que ces personnes ET leur management arrêtent de se raconter des histoires. La responsabilité du burn-out repose pour la plus grande part sur les épaules de l’employeur. Et donc, les possibilités d’action et de prévention aussi.

C’est pour cette raison que ce qui fonctionne en cas de burnout est l’accompagnement global. Il implique la personne touchée, son management et les RH de son entreprise. Dans ce cas, la réintégration est possible et se passe au mieux. Et en prime, l’entreprise ajuste les dysfonctionnements révélés par la situation. Elle a tout à gagner en termes d’efficacité, d’efficience et de motivation. Ça s’appelle saisir les opportunités révélées par une crise.

Sommaire
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    1. Le burnout c’est quoi ?

    Le burn-out, ou syndrome d’épuisement professionnel, est recensé parmi les risques psychosociaux –  ou Rps. En 2019, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a spécifiquement rattaché le burn-out à « un stress chronique au travail qui n’a pas été géré avec succès ».

    Pour le moment, le burnout n’est pas catégorisé avec les maladies professionnelles. Mais que nous dit cette définition ?

    D’une part, le burnout découle d’un stress intense. D’autre part, ce stress est rattaché explicitement au milieu professionnel. DONC un burnout n’a strictement rien à voir avec les problèmes personnels de ceux qui en souffrent. Le burn-out n’est pas une dépression nerveuse. Le burn-out est une souffrance au travail et peut conduire à une dépression. L’inverse n’est pas vrai.

    Un mot sur la petite phrase floue du stress « qui n’a pas été géré avec succès ». Elle me fait sortir la fumée par les naseaux. Mais QUI est supposé gérer le stress avec succès ? Qui dit contexte professionnel dit aussi contrat de travail. Ce qui implique plusieurs parties. Je vous propose de passer en revue les causes du burnout, afin de bien comprendre qui est responsable de quels leviers. Et donc qui dispose de quelle marge de manœuvre.

    2. Les causes déterminantes du stress en entreprise

    Facteurs personnels : y a-t-il des personnes prédisposées au burnout ?

    La réponse est OUI. C’est d’ailleurs le premier réflexe, maladroit, des employeurs pour imputer la responsabilité du problème à ceux qui en sont victimes. Le souci pour lesdits employeurs, c’est que ceux qui font un burnout ont tous un point commun : ce sont les plus engagés, les plus motivés, les plus énergiques et résistants parmi les salariés. Les bourreaux de travail. Ceux qui éprouvent un sentiment d’accomplissement au travail. Pour eux, le travail fait sens. Dans le long chemin qui les mène au burn-out, le travail va même prendre toute la place dans leur vie, au détriment de leur vie personnelle. Ils ne prêtent aucune attention aux signes d’épuisement qui se multiplient. Lombalgies, migraines, troubles de l’appétit et du sommeil… Les symptômes physiques ne trompent pas. Et pourtant, les personnes en stress chronique n’y prêtent aucune attention.

    Quand le stress devient chronique

    Leur environnement de travail est pourtant toxique. Elles s’obstinent à atteindre des objectifs très élevés dans des conditions dysfonctionnelles, ou avec un management défaillant. Elles sont hyper investies émotionnellement dans leur travail. Ce qui constitue un piège redoutable : leur épuisement physique se combine à un épuisement cognitif et à un épuisement émotionnel. Le burn-out, c’est littéralement cela : toutes les ressources sont carbonisées. Le chemin est long : supporter la pression en dépit des signaux de fatigue, puis commettre des erreurs de débutant qui vous plongent dans un sentiment d’impuissance. Ensuite, la victime s’isole et développe un cynisme inhabituel. Enfin, c’est la phase d’épuisement qui ne survient qu’au terme d’un long processus.

     

    Le travail en mode burn-out

    C’est parce qu’elles sont résistantes au stress que ces personnes peuvent tenir si longtemps avant de craquer. Le cortisol, ou hormone du stress, inonde leur organisme. Ce qui les maintient dans l’illusion qu’elles n’ont pas de souci. Elles encaissent et tiennent le cap en dépit des conditions toxiques dans lesquelles elles évoluent. Elles ne posent pas leurs limites, ne savent pas dire non. Elles minimisent leurs problèmes physiques et sont dans le déni total de leur état. Jusqu’à ce que leur corps lâche. Et là, l’arrêt-maladie risque de durer. De 6 mois à un an. Dans la majorité des cas, elles seront seules pour prendre en charge leur guérison et quitteront leur entreprise.

    Le résultat ? Il n’y a pas que les victimes de burnout qui sont carbonisées : l’image et la réputation de leur employeur le seront aussi. Les personnes touchées sont dans un état traumatique : épuisement général, perte de sens,  sentiment d’incompétence et d’inutilité… Elles sont dans une sorte de dépersonnalisation. Les professionnels de santé parlent de zombification.

    Dans un contexte où le recrutement est si compliqué, se retrouver sur #balancetastartup ça peut faire très mal. Car le ressentiment de ces personnes est à la hauteur de l’engagement sans faille dont elles ont fait preuve avant de sombrer.

    Organisation du travail

    L’origine professionnelle du stress est une combinaison de plusieurs facteurs. Celui qui est déterminant du stress en entreprise est l’organisation du travail. C’est ce que j’appelle les facteurs organisationnels de burnout ; ils touchent au contenu et aux modalités de travail.

    Donc, imaginez que

    • Les objectifs à atteindre sont irréalisables humainement et/ou matériellement.
    • Il n’y a pas de vérification de l’adéquation entre les compétences et les activités.
    • L’organisation est floue, personne ne sait exactement qui est en charge de certaines activités, ou qui peut prendre une décision.
    • Certaines tâches sont décorrélées des pouvoirs de décision correspondant. Une personne prend les décisions – donc elle a la responsabilité des activités menées pas une autre personne qui en assume le rôle.
    • Des postes cumulent une activité de production et une activité de contrôle.
    • La charge de travail est excessive ou dépasse les limites des fonctions. Par exemple, une personne change de poste, mais continue à faire des tâches de son ancien poste (ah ben oui, elle le fait si bien).

    Tous ces éléments constituent les facteurs de stress les plus courants, la voie royale qui mène au burnout. C’est bien l’employeur qui a le pouvoir d’agir sur ces dysfonctionnements organisationnels. En formation de prévention  ou lors d’un accompagnement, j’échange avec les salariés pour les aider à repérer les dysfonctionnements organisationnels dans leur travail. Le retour d’informations pour le management et les RH vaut de l’or. En effet, les ajustements correctifs qui vont suivre vont profiter à toute l’organisation. Et la majorité du temps, il n’est pas besoin d’une embauche supplémentaire, car la surcharge de travail n’est pas forcément le premier problème cité. Il s’agit d’ajustements et de clarifications.

    Management et communication

    Je parle ici des facteurs relationnels du burnout, i.e. la façon dont les relations sont structurées dans l’organisation. Il s’agit principalement :

    • du mode de management
    • des processus de prise de décision
    • de la circulation de l’information
    • de la présence des personnalités toxiques qui pratiquent le harcèlement

     

    Imaginez que les décisions qui impactent les équipes sont imposées en top-down.

    Que les salariés ne sont pas écoutés. Qu’ils doivent sans cesse aller à la pêche aux informations via « radio couloirs ».

    Qu’ils sont régulièrement critiqués sans objectivité et que leurs demandes d’évolution restent lettre morte…

    Le stress qui en résulte est immense et donc, il va impacter leur santé. Or, le système relationnel et la culture de l’entreprise sont de la responsabilité de l’employeur.

    3. Stress chronique, burnout : que faire concrètement ?

    La première chose est de prendre la mesure du problème. Si dans votre entreprise une personne est victime de burnout, il s’agit probablement d’un de vos piliers. Dans les PME, ce peut être ceux qui étaient à vos côtés depuis le début de l’aventure par exemple. Ne laissez pas votre salarié seul confronté à la souffrance.

    Ensuite, il est tout aussi probable qu’il ne s’agira pas d’un cas isolé. Le burnout étant spécifiquement lié au contexte professionnel, si vous n’agissez pas pour modifier ce contexte, vous ne pourrez que déplorer d’autres burnout ou des départs de salariés complètement écœurés.

    En cas de burnout dans votre entreprise

    1. Reconnaissez le problème et maintenez le lien avec votre salarié en déroute. Qu’il ou elle comprenne que ce qui lui arrive vous affecte et que vous tenez à garder la relation. Le salarié se sentira reconnu et apaisé.
    2. Proposez un accompagnement global pour permettre à votre salarié de se ressourcer dans un premier temps. Le médecin-traitant diagnostique l’état de burnout. Tous ceux qui contribuent au ressourcement sont bienvenus : psychologue, sophrologue, naturopathe, nutritionniste. Ensuite, le coach prend le relais. Il permet de comprendre ce qui, dans sa façon de fonctionner, l’a conduit au burnout. Il va améliorer sa connaissance de lui-même, sa confiance et sa capacité à poser ses limites. Bref travailler sur ce qui est de sa responsabilité. Puis il va aller plus en détails sur son poste : organisation, management…
    3. Grâce au dialogue avec votre salarié, identifiez ce qui dysfonctionne dans votre organisation ou dans votre culture managériale. D’une part, parce que vous pourrez aménager son poste en fonction, et garantir un retour progressif. D’autre part, parce que pour le décideur que vous êtes, c’est de l’or en barres ! Car modifier votre organisation et/ou votre façon de manager ne coûte pas autant que la perte de votre employé – motivation des collègues – image – recrutement – formation… Ce que vous changerez va avoir des répercussions positives sur toutes vos équipes.

    Sachez appréhender le burnout comme un indicateur pertinent de dysfonctionnements structurels.

    Agir en prévention

    La prévention des risques psychosociaux, ça fonctionne très bien !

    • Faites suivre des formations préventives à votre management. Durant toute la période dite de burn-in, les victimes sont dans le déni total de ce qui leur arrive. Un manager sensibilisé aux indicateurs de stress et signes avant-coureurs d’épuisement pourra intervenir plus tôt.
    • Effectuez régulièrement un travail organisationnel avec les RH. La base d’un fonctionnement sain n’est pas une question de cohabitation entre gens sympas. Ce sont des structures claires où chacun sait situer qui fait quoi, qui décide de quoi, quelle est sa contribution.
    • Bien communiquer, bien manager n’est pas inné ! Les formations et le coaching seront d’un appui considérable autant aux managers qu’à leurs équipes.

    En résumé,

    • Le burnout est lié au contexte professionnel
    • Il impacte les salariés les plus motivés
    • Le burnout a des conséquences graves pour le salarié comme pour son entreprise
    • L’état d’épuisement psychique, physique et émotionnel nécessite un arrêt de travail long
    • Il est souhaitable d’assurer le retour au travail de la victime de burnout
    • Les facteurs conduisant au stress chronique sont de la responsabilité de l’entreprise : organisation, management
    • Le burnout est un indicateur de dysfonctionnement, et donc une opportunité d’amélioration organisationnelle et relationnelle

    Vous souhaitez en savoir plus sur le stress au travail ?

    • Si vous ne savez pas par où commencer, je vous propose d’analyser votre organisation du travail et votre mode de management. Téléchargez la check-list ci-dessous . Un mode d’emploi en 9 étapes pour vous guider dans votre démarche d’analyse et de prévention du stress professionnel.
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